Les paysages du Morvan ont évolué au fil des siècles selon l’occupation humaine. Cinq grandes périodes peuvent être décrites.
Au Ier siècle avant J.-C.
L’habitat est peu dense et relativement dispersé : de nombreuses routes relient les zones d’habitation entre elles. La forêt, principalement des chênes et hêtres, a pour vocation principale le chauffage, la cuisson, le travail du fer, la construction. L’agriculture est de type vivrière, avec un pacage des animaux dans les prairies et en forêt. Les haies sont déjà présentes et cloisonnent les différentes parcelles cultivées de légumineuses.
Au Moyen Âge
XIIe-XIIIe siècles
Le Morvan se dépeuple et se reboise suite au déclin de l’empire gallo-romain et aux invasions germaniques. Un terroir avec domaines seigneuriaux, tenures et villages serviles se constitue alors autour d’un château. Le seigneur fait défricher la forêt pour installer des parcelles cultivées et des prairies.
XIVe-XVe siècles
Les seigneurs font venir des familles de serfs étrangères au massif pour ouvrir, dans la forêt, des clairières agricoles avec hameaux. C’est l’origine de l’organisation en hameaux de l’habitat morvandiau. Les haies protègent les parcelles des dégâts du bétail qui pacage dans les bois.
Vers le milieu du XVIe siècle
L’essor du flottage du bois pour le chauffage de Paris permet aux forêts seigneuriales de prendre de la valeur. Les déboisements sont stoppés, la forêt est conduite par furetage pour répondre aux besoins de chauffage de la capitale. Cette technique, qui ne permet pas d’obtenir une futaie, a favorisé le hêtre qui devient l’essence dominante. Du XVIe siècle au XIXe siècle, les cours d’eau sont aménagés, des étangs sont creusés pour les besoins du flottage. Dès lors, les paysages se fixent, la répartition en terres cultivées et forêts exploitées ne change plus guère.
Vers 1840
L’utilisation des terres cultivées s’intensifie et s’optimise au début du XIXe siècle, sous l’effet de la croissance démographique. On compte approximativement 135 000 habitants à cette période. Le parcellaire est assez grand, et les cultures l’emportent sur le pâturage. Dans les forêts qui couvrent 30% du massif, la hêtraie-chênaie domine largement. Une première évolution se fait sentir avec l’apparition de taillis sous futaies dans quelques forêts domaniales ou communales, avec quelques coupes rases et un début d’enrésinement dans les forêts privées.
Au XXe siècle
Bien que la polyculture vivrière subsiste longtemps dans les zones les plus isolées, les prés progressent surtout après la Seconde Guerre mondiale avec l’élevage du charolais. Avec l’arrivée du charbon, la filière du flottage s’écroule et la forêt est alors délaissée dans un contexte général de déprise agricole et d’un dépeuplement du Morvan (35 000 habitants au recensement de 1999). Le paysage se referme, avec un enfrichement des terres agricoles qui évoluent petit à petit vers un stade forestier. L’instauration d’une nouvelle économie incitative de l’État (création du fonds forestier national) va bouleverser les paysages par une vague d’enrésinement sur les friches agricoles en premier lieu, puis en remplacement des feuillus. Cet enrésinement va être amplifié par la culture du sapin de Noël qui a traversé une période morose sur le marché français, conduisant les propriétaires de petites parcelles à ne plus faire les entretiens et à abandonner leurs plantations à elles-mêmes.
Les enjeux du XXIe siècle
L’évolution dans un contexte mondial de l’agriculture, de la forêt, du mode d’habitat amène une évolution prochaine des paysages. Les peuplements résineux arrivent progressivement à maturité, dessinant une période d’exploitation et de renouvellement de ces peuplements pour les prochaines décennies. La profession agricole du Morvan entre dans une phase de déprise, conduisant à l’abandon de terrains et à leur enfrichement.
Cette déprise est liée aux problématiques de transmission des exploitations. La pression urbaine sur le territoire tend à diminuer le respect du caractère architectural et urbanistique du Morvan. Le phénomène de changement climatique pourrait bien bouleverser la répartition des espèces végétales et animales et induire de profondes modifications dans les composantes du paysage.
Saurons-nous être tous écocitoyens pour préserver ce patrimoine paysager qui nous est si cher et si apprécié ?